WRITINGS

Céline V.

Quelle(s) question(s) soulèvent le travail pictural de Céline V. ?

De quelle singularité fait-il signe ?

« Être (je suis) face au monde »

Ainsi ce travail traversé -entre autres- par une érotisation qui nous renvoie à l’identité féminine, avec quelle aisance il s’empare de la surface/espace du support, du renversement des blancs du fond qu’il transforme en couleur, et ce joue des ratures, des graphitis, et de la provocation des mots et des signes… un champ d’expérimentation, dont les limites, sans qu’elles soient clairement marquées, n’en sont pas moins existantes ;

Qu’est-ce à dire ?

L’attitude empirique serait-elle obsolète ? non sans doute, mais le temps d’appropriation du geste, de la surface, de la couleur est amenée-sans surenchère-à se singulariser, (s’amplifier) à n’avoir à prouver quoi que ce soit, juste la seule conscience d’être face au monde et d’en donner son point de vue, hors de tout esthétisme, de tout effet.

D’une amie, Céline V. dit « chez elle rien n’est venu entre ce qu’elle voit et ce qu’elle dessine ».

Sans doute est-ce -entre autres- de ce désir qu’est habité l’œuvre de Céline V.

June 2009, A.M.

Un atelier avec des grandes toiles que l’artiste travaille tour à tour.

Chaque toile, une surface blanche, immense. Et des gestes lancés ! Des cris.

Et puis des gestes qui reviennent sur les cris, qui les atténuent, ou les soulignent ou les dissimulent partiellement.

Et puis aussi, des mots, des phrases lancées, puis parfois effacées, cachées. Naît alors l’envie de découvrir ce que l’on ne perçoit pas directement/ ou qui aurait sa vie propre dans le tableau ? Tout un espace pour deviner.

Une peinture proche de son écriture qu’elle réalise sur une vieille machine a écrire : une expressivité à fleur de peau, un rythme haletant, qui virevolte, repart, revient, laisse une empreinte soudaine, surprend.

V. Vanhamme

Pour Arié avec Piero della Francesca (Céline V.)

Un baiser

Un baiser

Un baiser

Je vois cette vierge

Je me demande si c’est pour sa splendeur

Je la porte en moi maintenant

Ou alors elle est toujours devant moi comme un filtre de pensées

            Non, non elle n’enlève pas le paysage que je regarde pour qu’elle apparaisse

C’est un paysage dont on n’en retient que la lumière parce qu’on n’a pas les yeux figés sur les contours.

Il part de toi

Il n’a pas vraiment de fin alors il te donne le paysage que tu as

derrière toi

Pour faire ce trajet il est entièrement passé par toi

Ça c’est

Un baiser

Mais la vierge

Elle embrasse ?

Celle de Piero della Francesca elle baise oui !

Elle est belle

C’est peut-être même Dieu qu’elle a eu en elle

C’est peut-être même son homme qu’elle a eu en elle

Ah non c’est vrai !

Et ! t’y crois toi, petit garçon, à cette histoire ?

Oui ! toi !

Il doit bien y avoir des miracles

« Non ! c’est TOUT maintenant ! il est l’HEURE. ON DORT. »

Et dans le silence.

Tu découvriras mon baiser

Il devrait exister comme un enfant qui prétend ne pas être fatigué et qui pourtant s’endort au départ de l’énigme de l’histoire que tu es en train de lui raconter

Lui, il a eu le cœur remplit de te savoir l’accompagner oui dans cet endroit de solitude.

Mais toi, tu n’as pas raconté ton histoire et pourtant lui est heureux.

Mais c’est quelle histoire ?

Raconte.

Et Dieu qui est aux cieux…

et ben nous pas !

Et pourtant nous aussi

C’est à empoigner pour être certain que tu es en train de le vivre

D’ailleurs je t’ai empoigné je crois

Un baiser à recommencer encore juste une fois

Mais seulement une fois

Parce que tu n’aurais même pas du recommencer

Est-ce que tu le sais au moment même

Et pourtant tu le sais

C’est entre ces 2 phrases que se trouve mon baiser

C’est dans cet espace mental

Mon baiser est le plus beau des baisers

Par ce que comme l’autre est-ce que j’ai embrassé ?

Oui.

Oui, on pourrait dire pas de miracle pour moi

Et BEN c’est pas vrai

C’est pas parce que tu rentres dans la réalité que ça n’existe PAS

D’ailleurs elle n’est la qu’en peinture

Je te signale !

A toi, petit garçon qui doit être forcément dans tes rêves pour embrasser une femme

Non non je sais

C’est de moi, petite fille que je parle

Ne m’abandonne pas alors

Laisse-moi m’envoler alors

Que je m’envole de moi ! putain de merde.